Au vu des statistiques actuelles il semble évident et possible d’affirmer que le harcèlement sexuel et les agissements sexistes au travail existent bel et bien. Ils concernent d’autant plus les femmes, qui sont, généralement, les victimes.
Il semble opportun de définir chacune de ses notions afin qu’elles soient plus claires et surtout plus compréhensibles.
D’abord, la définition du harcèlement sexuel a été posée récemment par le législateur (dénomination abstraite qui regroupe les personnes qui font les lois). Il est donc ici question de la loi n°2021-1018 du 2 août 2021 qui introduit l’article L1153-1 dans le Code du travail.
Cette loi permet d’harmoniser la définition du harcèlement sexuel au travail avec celle donnée dans le Code pénal puisqu’effectivement, le harcèlement est également réprimé au niveau pénal, il constitue un délit.
Le Code du travail s’articule comme suit : Livre 1er, Titre V « Harcèlements », article L1153 du code suscité. Ainsi, au vu de sa présence dans le premier livre du code, le législateur semble vouloir
démontrer que le harcèlement revêt un caractère primordial, il s’agit d’une problématique importante, qu’il convient d’encadrer strictement.
Ainsi, le harcèlement sexuel est défini comme étant des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui sont répétés et
qui portent atteinte à la dignité en raison du caractère humiliant ou dégradant ou qui créent une situation intimidante pour le salarié.
Ce texte poursuit en ajoutant d’autres possibilités. Effectivement, un salarié qui subit ceci par l’agissement de plusieurs personnes,
concertées ou non, cela peut être qualifié de harcèlement sexuel. La loi va encore plus loin puisqu’au-delà de la définition même du
harcèlement, c’est-à-dire d’une répétition d’évènements en principe, le Code du travail admet que le harcèlement puisse consister en toute
forme de pression grave même non répétée et exercée dans le seul but d’obtenir un acte de nature sexuelle.
Cette définition n’a pas toujours existé ou était moins complète. Effectivement, ce n’est qu’avec la loi du 22 juillet 1992 que le délit
de harcèlement sexuel dans les relations de travail est créé. D’autres changements sont ensuite apparus (loi du 6 août 2012 relative au
harcèlement, loi du 4 août 2014 qui concerne l’égalité entre les femmes et les hommes et qui vise notamment l’intégration des
dispositions relatives au harcèlement moral et sexuel dans le Code de la défense).
Il convient également d’aborder la notion de sexisme. Parfois vu comme une discrimination, la chambre criminelle de la Cour de cassation, qui est donc la juridiction suprême dans l’ordre judiciaire français, a pu affirmer, en 2017, que le sexisme était un comportement discriminatoire qui, répété, pouvait être condamné comme une forme de harcèlement moral discriminatoire. On peut d’ores et déjà remarquer que toutes ces notions se regroupent, dans un sens, mais restent différentes (Cour de cassation, chambre criminelle, 11/07/2017, n°16-85.214).
Il semble désormais important de discuter, brièvement, de la relation qui existe entre le harcèlement au travail et le harcèlement au niveau pénal. Le harcèlement sexuel est présent à l’article 222-33 du Code pénal qui précise ceci : « I. – Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à
une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa dignité
en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
L’infraction est également constituée :
1° Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime
par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de
l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de
façon répétée ;
2° Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même
victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en
l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements
caractérisent une répétition.
II. – Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété,
d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent
d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au
profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
III. – Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans
d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.
Ces peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 €
d’amende lorsque les faits sont commis :
1° Par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;
2° Sur un mineur de quinze ans ;
3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge,
à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique
ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;
4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance
résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est
apparente ou connue de leur auteur ;
5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice ;
6° Par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne
ou par le biais d’un support numérique ou électronique ;
7° Alors qu’un mineur était présent et y a assisté ;
8° Par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime
une autorité de droit ou de fait. »
On pourrait croire que les définitions, dans les deux matières (droit pénal et droit du travail), sont les mêmes. Pourtant, la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt de 2020, a jugé que le harcèlement sexuel au travail pouvait être caractérisé même si le chef d’entreprise avait été relaxé au pénal : il existe ici une autonomie des deux matières (Cour de cassation, chambre sociale, 25/03/2020, n°18-23.682).
Pour ce qui est du salarié, le Code du travail est très clair : un salarié ne peut être sanctionné pour avoir refusé de subir ce
harcèlement ou pour l’avoir relaté. Cela est expressément écrit dans les articles L1153-2 et L1153-3 du code précité.
D’ailleurs, le juge a l’obligation de vérifier si les sanctions prises à l’encontre d’un salarié ayant dénoncé des faits de harcèlement ne
constituent pas une mesure de représailles ce qui pourrait, dans ce cas, dissuader d’autres salariés de faire part de tels agissements.
Cela a été affirmé par la chambre sociale de la Cour de cassation en juillet 2020 (Cour de cassation, chambre sociale, 8/07/2020,
n°18-23.410).
Pour terminer, le harcèlement sexuel et les agissements sexistes doivent être certes réprimés mais également évités. Le législateur a,
en effet, mis en place une politique de prévention. Cette prévention se trouve à la charge de l’employeur, lui seul à le pouvoir de
dissuader et d’empêcher ces agissements. Cela est clairement rappelé dans l’article L1153-5 du Code de travail qui explique donc ceci : «
L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir
les faits de harcèlement sexuel, d’y mettre un terme et de les
sanctionner.
Dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des
locaux où se fait l’embauche, les personnes mentionnées à l’article L.
1153-2 sont informées par tout moyen du texte de l’article 222-33 du
code pénal ainsi que des actions contentieuses civiles et pénales
ouvertes en matière de harcèlement sexuel et des coordonnées des
autorités et services compétents. La liste de ces services est définie
par décret. »
C’est donc à l’employeur de prendre toutes les mesures utiles afin d’éviter ces agissements qui, malheureusement, et au vu de la
jurisprudence (qui regroupe toutes les décisions de justice), sont encore très présents, même dans l’esprit des gens, sans forcément s’en
rendre compte.
Il faut continuer de se battre contre tout cela, le harcèlement moral, sexuel, les agissements sexistes mais aussi les discriminations, dans
le monde du travail. Le législateur semble vouloir faire bouger les choses, mais est-ce assez rapide… À vous de vous faire votre propre opinion désormais !
Merci.
Article rédigé par Odéïs COSSART, étudiante en Master Justice, procès et procédures.
Article rédigé durant le stage effectué chez Maitre Juliette Clerbout, Avocat au Barreau de Saint-Omer, en juin 2022.
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