Une femme sur cinq dit avoir été confrontée à une situation de harcèlement sexuel au travail.
Si vous pensez en faire partie, cet article vous concerne
Tout d’abord comment est défini le harcèlement sexuel ?
Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante selon l’article L 222-33 du Code pénal.
Le Code du travail prohibe le harcèlement sexuel. L’article L 1153-1 du Code du travail dispose que : « Aucun salarié ne doit subir des faits :
1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers »
Le harcèlement sexuel est qualifié de délit par le droit pénal.
Quelles situations peuvent être qualifiées de harcèlement sexuel ?
La loi vise tous les actes ou propos à connotation sexuelle, de sorte que le harcèlement sexuel n’est pas limité aux agissements physiques
Les agissements peuvent être de différents types.
Les formes les plus fréquentes de harcèlement sexuel sont verbales : plaisanteries obscènes, compliments appuyés ou critiques insistantes sur le physique, le comportement, la tenue vestimentaire, questions intrusives adressées à la personne harcelée sur sa vie sexuelle, volonté de créer une intimité inadaptée.
Ces faits peuvent également s’exprimer par écrit (lettres, sms, courriels) ou à travers d’images ou de vidéos à caractère pornographique envoyées ou montrées à la personne harcelée.
Le harcèlement sexuel peut aussi se traduire par de multiples attitudes : détailler avec insistance le physique d’une personne, la siffler, poser la main sur l’épaule ou sur le genou, toucher les cheveux ou un vêtement.
Les avances peuvent être assimilées à un harcèlement sexuel, dès lors que la victime exprime clairement son refus à l’auteur des agissements.
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« Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage, aucun candidat à un recrutement, à un stage ou à une formation en entreprise ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte […], pour avoir subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel » (Art L.1153-2 du Code du travail)
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Quelle est la frontière entre harcèlement et séduction ?
Séduction = rapport d’égalité
Harcèlement = rapport de domination
La séduction exige le consentement. Lorsqu’une personne souhaite séduire une autre personne, elle a des propos respectueux.
Dans le harcèlement, il y a une volonté de pouvoir, de domination sur la victime. La personne qui harcèle ne cherche pas à séduire ou à plaire.
Il y a un dominant et un dominé.
La personne qui fait l’objet de harcèlement sexuel ne consent pas et ne désire pas ces comportements ou propos à connotation sexuelle.
C’est donc bien le critère de l’absence de consentement de la victime qui caractérise une situation de harcèlement sexuel
Le harcèlement sexuel doit-il nécessairement être le fait d’un supérieur hiérarchique à l’encontre de l’un de ses subordonnés ?
Non. Il n’est pas nécessaire qu’il existe un lien de subordination entre le harceleur et la victime : le harcèlement sexuel peut avoir lieu « entre collègues »
Le harcèlement sexuel peut également être le fait d’un subordonné à l’égard de son supérieur.
Exemples de situations concrètes de harcèlement sexuel
- Partager des images ou des vidéos sexuellement inappropriées, comme de la pornographie avec des collègues de travail
- Suivre une collègue de travail sur le parking des salariés, dans le supermarché où elle fait ses courses et jusqu’à son domicile
- Envoi de lettres, de notes ou e-mails suggestifs
- Tenir des propos à caractère sexuel de manière répétée
- Affichage d’images ou d’affiches sexuelles inappropriées dans l’espace de travail
- Faire des gestes sexuels inappropriés
- Regarder fixement d’une manière sexuellement suggestive ou offensante
- Faire des commentaires sexuels sur l’apparence, les vêtements ou les parties du corps
- Toucher, y compris pincer, tapoter, frotter ou effleurer délibérément une autre personne de façon inappropriée
- Poser des questions d’ordre sexuel, par exemple sur les antécédents sexuels ou l’orientation sexuelle d’une personne
- Remarques sexistes ou désobligeantes
- Placer sur le bureau du salarié ou encore dans sa voiture par exemple des revues pornographiques
- Proposer une promotion à un ou une subordonnée en échange de faveurs sexuelles
- Afficher des images pornographiques dans l’espace de travail
Vous vous reconnaissez dans l’une de ses situations ?
Vous pouvez déposer une plainte pénale visant le harceleur :
– en vous adressant à un commissariat de police ou une brigade de gendarmerie
– en écrivant directement au procureur de la République à l’adresse du Tribunal de grande instance du lieu de l’infraction ou du domicile de l’auteur de l’infraction
Il est possible aussi de former un recours devant le Conseil de prud’hommes pour obtenir une indemnisation du préjudice subi pour manquement de votre employeur à son obligation de santé et sécurité de ses employés. Il faut démontrer qu’il n’a pas prévenu ces agissements ou n’a pas agi suite à la dénonciation des actes.
Il faut aussi essayer de réunir le maximum de preuves comme par exemple comme des témoignages, un certificat médical, des SMS, des captures d’écran ou encore des emails. Il faut noter tout ce qui se passe, jour après jour.
Que dit la jurisprudence sur le harcèlement sexuel au travail ?
Dans un arrêt de la Cour d’Appel de Versailles en date du 5 mars 2020, une salariée victime de harcèlement moral ou sexuel peut obtenir des dommages et intérêts sur ce fondement mais également, de manière cumulative, sur celui du manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur si elle justifie de préjudices distincts.
La jurisprudence est riche en matière de harcèlement sexuel au travail.
Dans un arrêt du 17 mai 2017, la Cour de cassation reconnaît « qu’un fait unique peut suffire à caractériser le harcèlement sexuel ». En l’espèce, le président de l’association pour laquelle la victime travaillait en qualité d’animatrice, avait « conseillé » à la salariée qui se plaignait de coups de soleil de « dormir avec lui dans sa chambre », « ce qui lui permettrait de lui faire du bien ». La salariée établissait un fait qui permettait de présumer l’existence d’un harcèlement sexuel.
Dans un arrêt plus récent datant du 18 novembre 2020, la chambre criminelle de la Cour de Cassation a rappelé « que c’est bien à partir du point de vue de la victime des agissements de harcèlement sexuel, dans ce qu’elle a subi que se positionnera le juge pour la qualification de l’infraction, et pas à partir de celui de l’auteur de ces agissements, qui prétend et allègue la gentillesse de son comportement ».
Quelles sont les peines encourues ?
Le harcèlement sexuel est un délit pénal, sanctionné d’une peine de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende majorée en cas de circonstances aggravantes, par exemple, si les faits sont commis par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions
La victime peut également obtenir des dommages et intérêts.
Article rédigé par Clémence HOPSOMER (Saint-Omer) -Juriste stagiaire au sein du cabinet de Maitre Juliette Clerbout (Avocat au Barreau de Saint-Omer)
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