Bonjour,
L’inaptitude est une procédure particulière en droit du travail.
Quand le médecin du travail considère qu’un salarié n’est plus apte à occuper son poste, alors le médecin du travail (et lui seul) peut prononcer un avis d’inaptitude. (En effet les médecins généralistes et les médecins conseillent ne peuvent pas se prononcer sur l’aptitude ou l’inaptitude d’un salarié.)
L’employeur doit suivre l’avis du médecin du travail.
Il existe deux solutions différentes :
- Soit le médecin du travail dispense l’employeur de chercher un poste de reclassement. Dans ce cas, le médecin inscrit dans son avis d’inaptitude que tout maintien dans l’emploi serait gravement préjudiciable au salarié.
L’employeur devra alors mettre en place la procédure de licenciement pour inaptitude.
Au bout de la procédure, le salarié recevra une lettre de licenciement pour inaptitude.
- Soit le médecin du travail considère que le salarié conserve des capacités restantes.
Autrement dit, le médecin du travail considère que le salarié est inapte à occuper son poste actuel de travail mais qu’il est apte à occuper d’autres fonctions. (Une personne peut par exemple être inapte à un poste physique mais apte à un poste de type administratif).
Dans ce cas, l’employeur devra chercher un poste de reclassement c’est-à-dire que l’employeur devra chercher un poste de travail compatible avec l’état de santé du salarié et l’avis du médecin du travail.
Depuis une quinzaine d’années, il y a de plus en plus souvent de déclarations d’inaptitude. (Cela est à mon sens notamment dû à l’allongement des carrières).
Les inaptitudes sont consécutives soit à des problèmes de santé physiques soit à une souffrance psychologique.
Les dossiers d’inaptitude donnent lieu à beaucoup de contentieux.
Les jurisprudences, c’est-à-dire les décisions de justice, donnent beaucoup d’informations sur les obligations de l’employeur et les droits des salariés dans ce domaine.
En effet, en matière d’inaptitude, les textes sont assez généraux.
Il faut donc, pour les avocats en droit du travail, lire régulièrement les jurisprudences sur l’inaptitude pour obtenir des précisions.
Récemment, la Cour de cassation (la plus haute juridiction en droit français) a rendu deux décisions importantes.
La première décision date du 4 novembre 2021 et a été rendue par la chambre sociale (Pourvoi N°19-18908). (C’est une chambre spécialisée dans les questions relatives au droit du travail).
Un salarié avait été déclaré inapte à occuper son poste actuel.
L’employeur a fait au salarié trois propositions de reclassement.
Autrement dit, l’employeur a proposé au salarié inapte trois postes de travail.
Le salarié (comme le droit le lui permet) a refusé ces trois propositions.
L’employeur a repris le paiement du salarie de l’employé (comme la loi l’y oblige).
Mais l’employeur n’a pas mis fin à la relation de travail.
Autrement dit, le salarié restait toujours dans les effectifs de l’entreprise.
Le salarié estimait que l’employeur avait un comportement fautif.
Pour le salarié, comme il avait refusé les propositions de reclassement, l’employeur devait procéder à son licenciement pour inaptitude.
L’employeur ne l’a toutefois pas fait.
Le salarié a alors saisi la justice pour obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail. (Et ce alors même qu’il continuait à percevoir son salaire intégralement).
Quand la justice accepte une demande de résiliation judiciaire, la rupture produit alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En cas de résiliation judiciaire acceptée, le salarié a alors le droit à une indemnité légale de licenciement, l’indemnité compensatrice de préavis, l’indemnité relative aux congés payés y afférents et des dommages et intérêts. (Les dommages et intérêts se calculent d’une part selon l’ancienneté et d’autre part selon le préjudice subi).
La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 4 novembre2021, a fait droit à cette demande.
Autrement dit, la haute juridiction accepte de rompre le contrat de travail aux torts de l’employeur.
Pour la Cour de cassation, la faute de l’employeur est de maintenir « délibérément le salarié dans une situation d’inactivité forcée au sein de l’entreprise sans aucune évolution possible ».
A ma connaissance, c’est la première fois que la Cour de cassation fait droit à une telle demande.
Je vais donc suivre attentivement la jurisprudence des prochains mois pour voir si cette solution est confirmée.
L’autre arrêt important est celui rendu le 1er décembre 2021 par la chambre sociale (Pourvoi N°19-20139).
En l’espèce, un salarié a été déclaré inapte par le médecin du travail.
Conformément aux dispositions du Code du travail, un mois après l’avis d’inaptitude, l’employeur doit reprendre le paiement de l’intégralité du salaire.
Autrement dit, si un mois après l’avis d’inaptitude le salarié n’a été ni reclassé ni licencié, il continuera à percevoir 100% de sa rémunération.
La question qui se posait ici était le point de départ du délai d’un mois.
Le salarié prétendait que le paiement du salaire devait reprendre un mois après l’avis d’inaptitude.
L’employeur soutenait quant à lui que le paiement du salarie devait reprendre un mois après la notification de l’avis d’inaptitude. (Dans cette affaire l’employeur n’avait pas reçu l’avis d’inaptitude le jour où celui-ci a été émis par le Médecin du travail).
La différence était importante puisque s’étaient écoulés plusieurs jours entre l’avis du médecin du travail et sa notification à l’employeur.
La réponse de la Cour de cassation est claire : « le point de départ du délai d’un mois à l’expiration duquel l’employeur doit reprendre le paiement des salaires est la date de l’examen de reprise ».
Cette décision n’était pas évidente car la Cour d’appel de Versailles avait une position contraire.
Il convient toutefois de saluer cette décision protectrice des droits du salarié.
Pour une question de preuve il est bien évidemment toujours conseillé au salarié de conserver précieusement ses avis d’aptitude et d’inaptitude.
Juliette CLERBOUT
Avocat au Barreau de Saint-Omer (Le cabinet est situé à Arques, ville dépendant du Barreau de Saint-Omer)
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