Au regard de l’article L1232-1 du Code du Travail, tout licenciement doit revêtir une cause réelle et sérieuse afin d’être justifié. Au sein même de ce mode de rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur, il existe deux catégories de licenciement :
→ le licenciement économique qui relève d’un évènement économique extérieur à la relation de travail
→ le licenciement pour motif personnel qui revêt une raison liée à la personne du salarié
À l’intérieur de cette dernière catégorie, le licenciement peut relever d’une faute commise par le salarié (licenciement pour faute) ou encore d’une situation que l’on ne peut lui imputer puisqu’elle ne relève pas d’une faute commise par lui mais qui ne permettent pas pour autant son maintien dans l’entreprise (licenciement pour motif non disciplinaire). L’on évoque par exemple le manque d’efficacité ou de productivité.
Avec l’évolution de la jurisprudence l’on peut souligner qu’il existe plusieurs paramètres pouvant être pris en considération. Parmi ceux-ci l’on peut citer l’importance de la conséquence de la faute sur l’entreprise en matière de dysfonctionnement, la conséquence sur la réputation de l’entreprise ou le coût financier du préjudice, les fonctions du salarié et surtout la récurrence de la même faute.
Bien que la limite entre les types de licenciements soit imprécise, et sera laissée à l’appréciation du conseil de prud’hommes.
En effet, le code du travail ne définit pas précisément les contours de chaque licenciement. Il conviendra de se référer à la jurisprudence (c’est-à-dire à toutes les décisions judiciaires qui ont été rendues par les juridictions) pour comprendre quels critères sont pris en compte dans l’appréciation de la gravité des actes.
En matière de licenciement pour faute, c’est-à-dire hors licenciements économiques et licenciements non disciplinaires, nous envisagerons plus précisément ici 3 types de procédures qui se distinguent en degrés : faute simple, faute grave et faute lourde. Dans ces 3 cas l’employeur doit respecter les obligations légales de la procédure de licenciement pour motif personnel, et ainsi suivre des étapes de formalités précises telles que convoquer le salarié à un entretien préalable, s’entretenir avec le salarié mis en cause, lui envoyer une lettre de licenciement s’il décide finalement de le licencier, lui accorder une préavis si c’est le cas, puis satisfaire aux obligations liées à la rupture du contrat.
Présentation de la convocation à l’entretien préalable :
L’employeur doit présenter la convocation au salarié au moins 5 jours ouvrables avant le jour de la convocation à l’entretien préalable. C’est ce qu’indique le troisième alinéa de l’article L1232-2 du code du travail. L’alinéa qui le précède dispose que la convocation se fait par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge.
Cette lettre doit préciser expressément qu’il s’agit d’un potentiel licenciement puisque la mention de convocation « à un entretien en vue d’une sanction » n’est pas suffisante (Cass. soc. 31 janv. 2007, n° 05-40540). En revanche, les faits reprochés au salarié n’ont pas nécessairement besoin d’y figurer (Cass. soc. 4 fév. 2009, n° 07-41.378). D’ailleurs, l’employeur qui aurait écrit des reproches dans cette lettre n’est pas contraint de s’y tenir. Seuls les motifs du licenciement présentés oralement au cours de l’entretien préalable puis à l’écrit dans la lettre de licenciement importent.
Concernant maintenant le cadre spatio-temporel, l’article R1232-1 du code du travail précise que la convocation doit indiquer une date, une heure et un lieu déterminés de cet entretien.
L’omission ou l’erreur d’une mention peut entraîner une irrégularité de la procédure causant au salarié un préjudice. C’est au salarié qu’il revient de prouver l’existence et l’étendue de ce préjudice certain.
Des modèles de convocations à un entretien préalable au licenciement pour motif personnel sont disponibles sur le site du Service Public.
L’entretien préalable :
L’entretien doit se tenir au minimum 5 jours ouvrables après la présentation de la convention au salarié.
Le premier alinéa de l’article L1232-2 du code du travail précise que « L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable ».
Le salarié peut choisir de se présenter à l’entretien seul ou venir accompagné par un représentant du personnel ou l’un de ses collègues. D’ailleurs cette option est recommandée puisque cela permet à chacune des parties qu’un tiers puisse témoigner de ce qui sera dit pendant l’entretien. Au regard de l’article R1232-1 du même code ainsi qu’une jurisprudence constante établie (Cass. soc. 6 fév. 2001, n° 98-43597), la mention selon laquelle le salarié peut venir assisté par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, est obligatoire.
L’assistance d’une personne extérieure à l’entreprise rend la procédure irrégulière ; même si cette présence n’a pas entravé le déroulement de l’entretien (Cass. soc. 20 juin 1990, n° 87-41118). C’est ainsi que ni l’employeur, ni le salarié ne peuvent être accompagnés d’un avocat par exemple. Toutefois, du fait souvent de la distance qui sépare l’employeur et le salarié, l’employeur peut être représenté par une personne qui en a le pouvoir. Ce mandat peut être donné à n’importe quelle personne mais celle-ci doit obligatoirement faire partie de l’entreprise.
L’objectif premier de cet entretien est d’instaurer un dialogue entre les parties, de permettre à chacun d’expliquer leur point de vue mais également de trouver une solution moins sévère qu’un licenciement, si cela paraît envisageable. L’employeur est tenu de donner les raisons pour lesquelles il souhaite licencier son salarié et lui donne ensuite la parole afin qu’il puisse tenter de se défendre et éclairer la situation.
L’envoi de la lettre de licenciement :
Si les parties n’ont pas trouvé de solution alternative au licenciement alors l’employeur est contraint d’envoyer la lettre de licenciement à son salarié.
La notification du licenciement se fait forcément par lettre recommandée avec accusé de réception et comprend les motifs du licenciement.
L’employeur ne peut plus inscrire dans la lettre de licenciement des reproches qui n’auraient pas été abordés au cours de l’entretien préalable. L’employeur ne peut pas non évoquer dans la lettre de licenciement des faits postérieurs à l’entretien préalable (Cass. soc. 30 mars 1994, n° 89-43716).
Là encore, en cas de licenciement pour faute, selon l’article L1332-2 du code du travail, l’envoi de la lettre doit respecter des délais spécifiques. Celle-ci ne peut pas être expédiée avant un délai de deux jours ouvrables suivant la date de l’entretien préalable au licenciement et ne peut pas non plus être expédiée plus d’un mois après le jour fixé de l’entretien.
Toutefois, des dispositions conventionnelles peuvent prévoir des délais différents
Vous trouverez ci-dessous des informations spécifiques aux 3 cas de licenciements dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée.
Spécificités de la procédure de licenciement pour faute simple :
Tout d’abord, la faute simple n’aboutit pas forcément à un licenciement. L’employeur qui reproche une telle faute à un salarié peut choisir de lui infliger un avertissement, une mise à pied ou un blâme. Comme précisé au dessus, la faute simple représente souvent une imprudence, une négligence ou tout manquement à ses obligations contractuelles. Si la faute justifie le licenciement alors le salarié peut rester dans l’entreprise le temps d’effectuer son préavis. La durée du préavis dépend de l’ancienneté et le statut du travailleur. Pour les salariés dont l’ancienneté dans l’entreprise est inférieure à 6 mois, la durée du préavis est fixée soit par convention collective, soit par accord collectif, soit par les usages pratiqués dans l’entreprise ou la profession. Lorsque son ancienneté est comprise entre 6 mois et 2 ans, la durée du préavis est d’un mois. Et lorsque son ancienneté dépasse 2 ans, la durée du préavis est étendue à 2 mois.
Une exception s’impose pour les travailleurs dont le statut est handicapé. Dans ce cas précis, la durée du préavis de licenciement correspond au double de la durée fixée pour les autres salariés, dans la limite de 3 mois.
Les indemnités accordées au salarié licencié pour faute simple sont les suivantes:
– Indemnité de licenciement. Qu’elle soit d’origine légale, conventionnelle ou contractuelle cette indemnité de licenciement est compatible avec les deux indemnités suivantes.
Le calcul de cette indemnité dépend de l’ancienneté du salarié.
– Indemnité compensatrice de préavis. Généralement, le salarié licencié doit exécuter une période de préavis. Toutefois s’il ne le fait pas il a droit à une indemnité compensatrice de préavis qui dédommage la durée du préavis non effectuée. Son montant est égal aux salaires qu’il aurait dû percevoir s’il avait effectué son préavis.
– Indemnité de congés payés. C’est la somme que le salarié perçoit, si au moment où il est tenu au courant de son licenciement, il n’a pas pu bénéficier de la totalité des congés payés auxquels il avait droit.
Spécificités de la procédure de licenciement pour faute grave :
Contrairement à la faute simple, la faute grave ne permet pas à l’employeur de maintenir le salarié fautif au sein de l’entreprise le temps que s’écoule la période de préavis. La faute grave a un impact tellement important qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise du salarié même pendant la durée limitée du préavis. L’employeur peut prononcer une mise à pied conservatoire, de laquelle découle l’obligation pour le salarié de quitter son poste en ne percevant toutefois aucune rémunération. Le salarié licencié pour faute grave sera privé de préavis. L’indemnité de licenciement et l’indemnité compensatrice de préavis ne lui seront pas non plus versés. Seule l’indemnité compensatrice de congés payés lui est accordée, et ce, uniquement s’il remplit les conditions c’est-à-dire si au moment de son licenciement le salarié n’avait pas pu bénéficier de la totalité de ses congés payés.
Ce type de licenciement doit impérativement intervenir dans un bref délai.
Il est également possible de se faire licencier pour une faute qui serait intervenue en dehors des heures ou lieux de travail. La gravité de la faute sera appréciée selon le rôle du salarié dans l’entreprise. Par exemple dans un arrêt en date du 20 novembre 1991 n° 89-44.605, la chambre sociale de la Cour de cassation a estimée que malgré que le salarié avait commis un vol hors de son temps de travail, il avait manifestement causé un trouble à la société de gardiennage puisque la victime était l’un des clients de cette société. Ce vol avait entraîné une conséquence sur le crédit et la réputation de cette dernière et rendait impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. La faute grave a été caractérisée.
Spécificités de la procédure de licenciement pour faute lourde :
Comme la faute grave, la faute lourde implique que le maintien du contrat de travail pendant la durée du préavis s’avère impossible.
La procédure doit donc être mise en œuvre dans un délai restreint.
La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 9 juillet 1991, a précisé que la faute lourde est une faute d’une particulière gravité commise par un salarié « avec intention de nuire à l’employeur ou à l’entreprise » (N° de pourvoi: 89-41890)
Pour pouvoir valablement licencier un salarié pour faute grave l’employeur doit démontrer une intention de nuire.
Si l’intention de nuire n’est pas démontrée par l’employeur le licenciement n’est pas valable.
Ainsi la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 21 juin 2006 a souligné que « sans relever l’intention du salarié de nuire à l’employeur » une Cour d’appel ne peut pas estimer qu’un licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse. (n° de pourvoi 04-43 388)
(Dans cette affaire il était question d’un salarié qui gérait son patrimoine privé en détournant les salariés de l’entreprise et qu’il versait sur le compte bancaire d’une de ses sociétés des sommes revenant à son employeur.)
Dans un autre arrêt, rendu le 29 avril 2009, cette même juridiction a rappelé que « la faute lourde suppose l’intention de nuire » du salarié. (n° de pourvoi 07-42294)
Encore récemment, dans un arrêt en date du 8 février 2017 publié au Bulletin annuel, cette juridiction a rappelé que « la faute lourde est caractérisée par l’intention de nuire à l’employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise ». (N° de pourvoi: 15-21064)
Pour résumer la faute lourde est donc une faute commise volontairement et dans l’intention de nuire à l’employeur.
La jurisprudence retient extrêmement peu souvent l’existence d’une faute lourde.
Même en cas d’infraction pénale la Cour de cassation considère qu’il n’existe pas de faute lourde si l’intention de nuire n’est pas démontrée par l’employeur.
Le salarié licencié pour faute lourde sera privé de préavis, ainsi que de l’indemnité de licenciement et l’indemnité compensatrice de préavis.
En plus de sanctionner le salarié par un licenciement, lorsque la faute commise a causé un préjudice à l’employeur, le salarié peut être condamné à le réparer en versant des dommages-intérêts. En revanche, tout comme pour la faute grave, la faute lourde ne l’empêche pas de recevoir une indemnité de congés payés.
Droit en chômage en cas de licenciement pour faute :
Généralement, toute rupture de contrat de travail donne le droit à l’allocation chômage. Ainsi, si les conditions sont remplies, le salarié licencié peut bénéficier des indemnités chômage versées par Pôle emploi, dont le calcul des allocations est relatif à ses cotisations précédentes et ne dépend aucunement du motif de licenciement. Un licenciement pour faute ne doit pas avoir de conséquences sur l’obtention d’un nouvel emploi. Le salarié peut bénéficier tout autant que les autres chercheurs d’emploi de formations et peut recevoir de l’aide par Pôle emploi pour reconstruire son projet personnel.
La possible contestation par le salarié et le contrôle du Juge :
Dès lors qu’un salarié s’estime injustement sanctionné ou du moins que le licenciement prononcé n’est pas approprié, selon lui, à la faute commise, il bénéficie de la possibilité de saisir le conseil de prud’hommes pour le contester.
Il existe un contrôle du pouvoir disciplinaire de l’employeur exercé par le Juge prud’homal. Ce Juge est en charge de contrôler l’existence, voire requalifier la gravité de la faute et de vérifier le respect de la procédure. Il s’assure du respect de la légalité et de la proportionnalité des mesures adoptées. Il tiendra compte des potentielles récidives disciplinaires, des circonstances dans lesquelles la faute a été commise mais également de l’ancienneté du salarié. S’il estime que la sanction est irrégulière, injustifiée ou disproportionnée alors le Juge pourra en prononcer la nullité.
Le Juge peut annuler la sanction.
Par exemple si le licenciement n’est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Conseils pour le salarié :
En tant que salarié, que vous reconnaissez être fautifs ou non il est important de connaître et faire valoir vos droits. Par exemple si vous contestez cette décision ou que votre employeur vous licencie abusivement ou de façon vexatoire, il est important de réunir toutes les preuves de la situation avec par exemple des attestations de témoins, des mails … afin de présenter un dossier solide devant le Conseil des Prud’hommes. Il peut être opportun de consulter un avocat spécialisé en droit du trav ail.
Article coécrit par : Cynthia Mcavoy, étudiante en droit et Juliette Clerbout Avocat au Barreau de Saint-Omer.
Attention : Le cabinet n’est plus situé à Saint-Omer mais à Arques. La réception se fait uniquement sur rendez vous. La prise de rendez vous est possible au 09 83 00 81 06
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