D’une manière générale, un licenciement abouti au départ définitif du travailleur de l’entreprise.
Toutefois, et fort heureusement pour lui, le salarié bénéficie de la possibilité de contester une telle décision, qui de toute évidence a été prise unilatéralement par l’employeur.
Si cette contestation est fructueuse il pourra alors potentiellement revenir travailler au sein de cette entreprise. Deux situations s’offrent aux parties : la réintégration facultative en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse OU la réintégration imposée en cas de licenciement nul.
Dans la première, l’accord express des deux parties est nécessaire.
Alors que dans la seconde hypothèse, seul l’avis du travailleur importe puisqu’une liberté fondamentale ou encore un statut protecteur lui a été méconnu.
Il conviendra ici de nous intéresser plus précisément à la seconde situation en abordant un arrêt récent de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 10 février 2021. (n° de pourvoi 19-20.397).
Dans cette affaire, un salarié initialement licencié pour motif personnel a obtenu la nullité de son licenciement en invoquant les agissements de harcèlement moral dont il soutient avoir été victime.
La Cour d’appel de Bastia par son arrêt rendu le 20 février 2019 a ainsi ordonné que le salarié soit réintégré soit dans l’identique emploi précédemment occupé par lui ou du moins un emploi équivalent (à savoir même secteur géographique, même rémunération, poste, qualifications et perspectives de carrière semblables).
Pour se pourvoir en cassation l’ancien employeur invoquera que la réintégration du salarié est compromise par le fait qu’il ait entre-temps retrouvé un emploi auprès d’un nouvel employeur.
Il est donc revenu à la Cour de cassation de se demander si un nouvel emploi pour le salarié fait ou non obstacle à son droit à réintégration.
Autrement dit, le fait pour le salarié d’être au service d’un nouvel employeur au moment où la décision de réintégration est prononcée l’empêche-t-il de bénéficier de son droit à réintégration dans son ancienne entreprise ?
La réponse est NON.
La Cour de cassation a retenu que le salarié conservait son droit à la réintégration alors même qu’il aurait retrouvé un emploi chez un autre employeur, et ce, tant que sa réintégration n’est pas matériellement impossible. C’est ce que suggère la solution de l’arrêt lorsqu’il dispose que les juges d’appel ont « exactement retenu que le fait pour le salarié d’être entré au service d’un autre employeur n’était pas de nature à le priver de son droit à réintégration ».
Cette solution est peu surprenante étant donné que la cour ne fait que s’aligner à la jurisprudence constante établie par un arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 2 février 2005 (n°02-45.085) dont les faits de l’espèce étaient similaires.
En d’autres termes, le prétexte selon lequel un salarié serait dorénavant subordonné à un nouvel employeur n’est pas suffisant pour lui voir refuser son droit à la réintégration. La procédure étant longue, la recherche de ce nouvel emploi découle vraisemblablement de son licenciement qui n’a été prononcé nul qu’ultérieurement et il serait absurde que cet emploi lui soit reproché.
En réalité, l’impossibilité matérielle de la réintégration d’un travailleur n’est que très rarement reconnue. Ordinairement, la Cour de cassation estime que la réintégration du salarié est matériellement impossible lorsque que ce dernier décide de partir à la retraite (Cass. Soc., 17 octobre 2018, n°16-27.597), qu’il aurait commis un acte de concurrence déloyale (Cass. Soc., 25 juin 2003, n°01-43.717) ou encore plus couramment si l’établissement est contraint de fermer (Cass. Soc., 15 juin 2005, n° 03-48.094). En revanche, la réintégration est souvent admise si c’est simplement le poste qui a été supprimé (Cass. Soc., 13 décembre 1994, n°92-42.454), voire même si l’entreprise rencontre des difficultés économiques (Cass. Soc., 24 juin 1998, n°95-44.757).
Conclusion : Dans cet arrêt, la chambre sociale de la Cour de cassation a pu rappeler le principe selon lequel le salarié dont le licenciement a été déclaré nul peut réintégrer son ancienne entreprise, alors même qu’il aurait signé, entre-temps, un contrat avec un nouvel employeur. Bien qu’un salarié n’ait pas forcément envie, pour plusieurs raisons évidentes, de retourner travailler dans son ancienne entreprise suite à un litige, c’est à lui seul que revient ce choix et aucunement à l’ex-employeur, qui se voit contraint d’accepter sa réintégration dès lors que celle-ci est matériellement possible.
Article rédigé par Cynthia McAvoy titulaire d’un Master 1 (Bac +4) en droit lors du stage effectué en juin/ juillet 2021 chez Maitre Juliette Clerbout avocat à Arques et membre du Barreau de Saint-Omer.
Si vous désirez en savoir plus sur le fonctionnement d’une procédure devant le Conseil de prud’hommes n’hésitez pas à consulter cet article.
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