Bonjour,
Comme vous le savez je suis avocat au barreau de Saint-Omer et j’exerce principalement en droit de la famille et en droit du travail.
En droit du travail (licenciement pour faute, demande de rappel de salaire, licenciement pour inaptitude …) il est important pour être à jour de suivre l’évolution des lois mais également l’évolution des décisions de justice.
De manière régulière je regarde les différentes décisions de justice récentes en la matière afin de conseiller au mieux mes clients. (En effet un avocat est un professionnel du droit qui met régulièrement ses connaissances juridiques à jour.)
Récemment deux décisions ont attiré mon attention.
Ces décisions ont un point commun: elles sont rendues par la Cour de cassation c’est-à-dire par la juridiction la plus hiérarchiquement élevée de l’ordre judiciaire français.
La première décision concerne le droit d’obtenir les bulletins de paie d’autres salariés.
La seconde décision concerne une faute commise pendant un CDD.
Voici quelques informations sur ces deux décisions récentes:
Avez-vous le droit d’avoir les fiches de paie de vos collègues ?
Certains peuvent se poser la question suivante : ai-je le droit d’avoir les bulletins de paie de mes collègues ?
La réponse de principe est non.
Les bulletins de paie et surtout les informations financières qui y sont présentes sont confidentiels.
Vous n’avez donc pas un droit acquis à connaître la rémunération de vos collègues de travail.
Toutefois, comme souvent en droit, à ce principe, il y a des exceptions.
La Cour de cassation, c’est-à-dire la plus haute juridiction française, a notamment expliqué une exception dans une décision rendue le 8 mars 2023 (Pourvoi N°21-12.492).
Il s’agissait d’une salariée licenciée par son employeur.
Durant la relation de travail, cette salariée de sexe féminin estimée avoir été moins bien rémunérée que ses collègues de sexe masculin.
Elle a saisi la formation de référé du Conseil de Prud’hommes.
Sa saisine, sur le fondement de l’article 145 du Code de Procédure Civile visait à obtenir la communication des bulletins de paie de ses collègues.
Elle a obtenu gain de cause et l’employeur a formé un pourvoi en cassation.
Autrement dit, l’employeur a demandé à la plus haute juridiction française de trancher ce litige.
La haute juridiction a soutenu le droit pour la salariée.
Il est expliqué que, pour démontrer une inégalité salariale avec ses collègues masculins, la salariée pourrait obtenir la copie des bulletins de salaire de 8 autres salariés.
Ces derniers avaient la particularité d’occuper des postes de niveau comparable au sien.
Pour obtenir la copie des bulletins, il faut deux éléments cumulatifs :
- Ces éléments doivent être indispensables à l’exercice du droit de la preuve,
- Ces éléments doivent être proportionnés au but poursuivi à savoir prouver l’inégalité de rémunération entre hommes et femmes.
Cette décision est importante à retenir.
Si vous n’avez pas tous les éléments pour prouver une différence illégitime de traitement, vous pouvez donc saisir le Conseil de Prud’hommes en référé pour obtenir « de force » ces éléments.
Cette décision concernait des inégalités salariales entre hommes et femmes.
On pourrait imaginer une décision similaire fondée sur des inégalités salariales entre personnes syndiquées ou non …
Les motifs de discrimination sont malheureusement nombreux.
Faute grave et CDD successifs
En droit français, la norme est le recours au CDI (Contrat de travail à Durée Indéterminée).
Ce n’est que par exception qu’un employeur a le droit de conclure un CDD (Contrat à Durée Déterminée).
Ce type de contrat peut être conclu par exemple pour remplacer un salarié absent, pour un emploi à caractère saisonnier (notamment dans le domaine agricole ou touristique), pour un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise, etc.
Les règles de rupture anticipée du CDD sont extrêmement strictes.
Une rupture anticipée d’un CDD, c’est-à-dire avant son terme, ne peut intervenir qu’en cas d’un commun accord, de force majeure, d’inaptitude du salarié, d’embauche en CDI ou de faute grave.
En droit du travail, la faute grave est une faute d’une telle importance qu’elle rend impossible la présence du salarié dans l’entreprise et même pour la courte durée du préavis.
Une salariée avait été embauchée dans le cadre de trois CDD successifs.
Ce dernier CDD a été rompu de manière anticipée par l’employeur.
Pour cette rupture anticipée, l’employeur invoquait une faute grave de la salariée.
La particularité de cette affaire résidait dans le fait que l’employeur invoquait des fautes commises au cours du CDD précédent.
Autrement dit, il n’invoquait pas des fautes commises pendant le CDD en cours.
La salariée a fait valoir ses droits et a demandé le paiement d’indemnités pour rupture anticipée illicite de son CDD.
La Cour d’appel a fait droit aux demandes de la salariée et a jugé que la rupture anticipée du dernier CDD était abusive et a condamné l’employeur à verser à la salariée deux sommes : tout d’abord des dommages et intérêts pour rupture abusive ainsi qu’à une indemnité spécifique de précarité.
L’employeur a décidé de se pourvoir en cassation.
Autrement dit, il a saisi la Cour de cassation c’est-à-dire la juridiction la plus haute.
La Cour de cassation a rendu sa décision le 15 mars 2023 (Pourvoi N°21-17.227).
Elle explique que les faits reprochés à la salariée sont antérieurs au 3ème CDD et que l’employeur n’a pas le droit de se baser sur des fautes commises antérieurement à la conclusion du contrat pour justifier la rupture de celui-ci.
Auteur de l’article juridique : Juliette CLERBOUT. Avocat au Barreau de Saint-Omer (Le cabinet est situé à Arques, ville dépendant du Barreau de Saint-Omer) Article rédigé et publié en avril 2023. Avertissement : cet article comprend des renseignements juridiques généraux. Il ne vaut pas consultation juridique individuelle.
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