Un arrêt maladie, même de longue durée, ne peut pas être en soit une cause de licenciement.
En effet un licenciement fondé uniquement sur l’état de santé du salarié serait discriminatoire et donc frappé de nullité.
Toutefois si par la longueur ou la répétition des absences, le fonctionnement ou l’organisation de l’entreprise en pâtit, le licenciement peut être envisagé.
La jurisprudence a expliqué que pour que le licenciement fondé sur l’absence prolongée ou les absences renouvelées (pour cause de maladie) du salarié soit fondé sur une cause réelle et sérieuse deux critères cumulatifs doivent être réunis.
Ainsi la Cour d’appel de Douai dans un arrêt en date du 30 septembre 2015 a expliqué que « la répétition des arrêts de travail pour maladie ou leur prolongation peuvent constituer un motif légitime de licenciement à la double condition qu’ils impliquent :
– une grave perturbation du fonctionnement de l’entreprise ;
– la nécessité de remplacement définitif du salarié malade » (n°14/03186)
Cette même juridiction dans un arrêt rendu le 30 octobre 2015 a rappelé que « la répétition des arrêts de travail pour maladie ou leur prolongation peuvent constituer un motif légitime de licenciement à la double condition qu’ils impliquent :
-une grave perturbation du fonctionnement de l’entreprise;
– la nécessité de remplacement définitif du salarié malade » (n°14/03172)
Les critères de la grave perturbation du fonctionnement de l’entreprise et de la nécessité de remplacer définitivement le salarié malade sont cumulatifs.
Je vais analyser avec vous, successivement, ces deux critères.
a/ Sur la perturbation du fonctionnement de l’entreprise
Pour que le licenciement fondé sur l’absence du salarié soit basé sur une cause réelle et sérieuse il faut que l’absence du salarié entraine une perturbation importante du fonctionnement de l’entreprise.
Autrement dit une légère désorganisation de l’entreprise ne suffit pas.
La chambre sociale de la Cour d’appel de Douai dans un arrêt en date du 31 mars 2015 a clairement expliqué que « l’absence du salarié doit perturber objectivement le fonctionnement de l’entreprise, le terme « entreprise » étant entendu au sens strict. Ainsi, la simple perturbation de l’établissement ou du secteur d’activité du salarié est insuffisante. » (n° 15/02459)
Dans un arrêt récent, rendu le 19 mai 2016, la chambre sociale de la Cour de cassation a également indiqué que l’absence doit entrainer une désorganisation du bon fonctionnement de l’entreprise et pas seulement une désorganisation d’un magasin.
Plus récemment la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 1er février 2017, a expliqué que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse si la lettre de licenciement vise simplement une perturbation dans le fonctionnement du service dans lequel travaillait la salariée et non de l’entreprise dans son ensemble.
La désorganisation sera, pour l’entreprise, plus aisément démontrable si le salarié a des compétences et connaissances particulières, une formation spécifique rendant son remplacement temporaire ou la répartition de ses tâches peu aisée.
Pareillement l’absence d’un salarié dans une entreprise de petite taille entraîne davantage de perturbations que dans un grand groupe.
Les juridictions prennent également en compte la longueur de l’absence ou le nombre des absences.
Outre la perturbation importante du fonctionnement de l’entreprise l’absence du salarié doit également nécessité son remplacement impérieux.
b/ Sur la nécessité impérieuse de remplacer définitivement le salarié absent
Pour qu’un licenciement pour cause d’absence soit justifié l’employeur doit démontrer la nécessité impérieuse de remplacer définitivement le salarié absent.
Le licenciement est sans cause réelle et sérieuse si l’entreprise a la possibilité de recourir à des travailleurs temporaires.
Ainsi la chambre sociale de la Cour d’appel de Douai dans un arrêt en date du 30 juin 2015 a expliqué que « les mesures, telles un licenciement, intervenues en raison de l’état de santé du salarié, sont frappées de nullité en raison de leur caractère discriminatoire. L’exception relative au licenciement dont le motif est la désorganisation de l’entreprise du fait des absences prolongées ou répétées du salarié malade, doit en conséquence être appréciée strictement. L’employeur qui licencie le salarié malade pour ce motif, doit justifier de la nécessité d’embaucher un autre salarié en remplacement, de manière définitive, par contrat de travail à durée indéterminée, à une date aussi rapprochée que possible du licenciement. » (14/02203)
Dans cette espèce la Cour d’appel a considéré que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse car l’entreprise avait la possibilité de remplacer le salarié absent par le recours à un travailleur temporaire.
Cet arrêt est intéressant car l’employeur expliquait que la spécificité des fonctions de chauffeur livreur au sein de l’entreprise, exigeait une formation d’au minimum deux mois.
Pour la Cour d’appel cet argument n’est pas pertinent car le salarié absent peut être remplacé par un autre salarié de l’entreprise et l’entreprise peut faire remplacer ce dernier par un recrutement par contrat à durée déterminée.
La Cour d’appel de Versailles dans un autre arrêt en date du 13 mai 2015 « a considéré qu’un licenciement était sans cause réelle et sérieuse car l’employeur ne versait « aux débats aucune pièce justifiant ‘ des spécificités incontournables’ ne permettant pas le remplacement de la salariée lors de ses absences par le recours à l’intérim ou un contrat à durée déterminée d’autant que cette dernière a remplacé pendant une semaine au service ‘exploration fonctionnelle’ une autre secrétaire médicale sans que cela ne pose problème . » (N° 13/04220)
La Cour d’appel de Versailles dans un autre arrêt en date du 26 octobre 2016 a considéré le licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse car l’employeur ne « ne justifiait pas de l’impossibilité de poursuivre le remplacement de la salariée par des contrats temporaires, notamment un CDD sans terme précis, comme le permet l’article L. 1242-7 du code du travail ». La Cour poursuit en précisant que la salariée absente « occupait un poste administratif de correspondancière-dactylo ne nécessitant pas de qualification particulière et même si les règles de fonctionnement de la caisse nécessitaient un minimum de formation et d’adaptation, il n’est pas justifié de ce qu’elles constituaient un frein à une telle embauche en intérim ou en CDD pour la durée de l’arrêt de travail. » La cour termine en indiquant que l’employeur ne démontre pas « l’absence de toute candidature à une offre de contrat temporaire à cette fin. » (n° 15/01451)
Il est utile de signaler que la Cour de cassation a la même position.
Ainsi la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 1er février 2017, a expliqué que «la lettre de licenciement doit énoncer expressément la perturbation dans le fonctionnement de l’entreprise et la nécessité de pourvoir au remplacement du salarié absent, dont le caractère définitif doit être vérifié par les juges du fond. » (N° de pourvoi: 15-17101)
Par conséquent l’obligation de remplacement n’est pas prouvée si les fonctions du salarié malade sont assumées par d’autres personnes comme des personnes recrutées en CDD.
Il en est de même si le travail est réparti entre plusieurs salariés, voire confié à des prestataires externes.
Il est crucial de signaler que le remplacement définitif d’un salarié absent pour maladie doit intervenir dans un délai raisonnable après le licenciement.
Juliette Clerbout Avocat au Barreau de Saint-Omer
Attention: Le Cabinet d’avocat est situé à Arques 10 C rue Jules Guesde (et non plus à Saint-Omer)
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